Mais quelle mouche a piqué ce producteur américain de bières « The Champagne of Beers » d’en exporter une palette de 2352 cannettes vers l’Union européenne ? Ignorance ? Naïveté ? Provocation ? ou tout simplement I don’t give a shit… Heureusement les douanes belges étaient vigilantes et ont répondu « Présent » ce jour de février dernier sur le port d’Anvers. Elles ont saisi la cargaison.
La retenue douanière a été effectuée sur la base de la réglementation européenne qui considère que les marchandises qui portent atteinte à une appellation d’origine dans l’État membre où elles se trouvent constituent des contrefaçons.
A la suite de cette saisie des douanes belges, le Comité Champagne – l’organisme interprofessionnel dont l’un des rôles fondateurs est la protection de l’appellation Champagne partout dans le monde – a confirmé aux douanes la nature illicite des marchandises et a demandé leur destruction.
Le destinataire en Allemagne a été informé et n’a pas contesté cette décision. Il faut dire que cela aurait été du plus mauvais goût. J’imagine qu’il a dû se faire tout petit…
Satisfecit général
Pour Kristian Vanderwaeren, le big boss de l’Administration Générale Belge des Douanes et Accises : « Nous effectuons chaque année des milliers de contrôles sur les appellations d’origine contrôlée…Si une contrefaçon est avérée, comme c’est le cas ici, nous nous concertons également sur la décision de détruire ces marchandises et sur la manière dont nous les faisons détruire ».
Et pour Charles Goemaere, Directeur général du Comité Champagne : « Cette destruction est le résultat d’une collaboration réussie entre les autorités douanières belges et les services du Comité Champagne. Elle confirme l’importance que l’Union européenne attache aux appellations d’origine et récompense la détermination des Champenois à protéger leur appellation ».
D’après le site Euractiv, un site spécialisé dans les affaires européennes : Ce manque à gagner pour l’UE atteint 4,2 milliards d’euros pour l’ensemble des spiritueux français – dont le champagne…
Alors on a envie de dire bravo, les Champenois sont bien défendus. Même si cette opération est plus symbolique qu’autre chose et tournée vers les médias, car le manque à gagner infligé au contrevenant ferait éclater de rire El Chapo du fond de sa prison du Colorado. Calculez vous-même : 2352 cannettes à disons 5€ pièce = même pas 12K€…
Retenons surtout que la réglementation sur les Appellations d’Origine s’applique impeccablement chez nous en Europe. Quoique…
Que fait la police ?
Si on regarde de près qui est le contrevenant américain ? Miller Brewing : un petit brasseur indépendant du Wisconsin ? Pas du tout, c’est une entreprise américaine qui fait partie d’un groupe européen : AB InBev, un groupe belge basé à Louvain ! Pour la faire courte, un groupe européen s’affranchit du droit qui le protège via une de ses filiales hors Europe ! Pas joli joli tout ça.
En effet la marque Miller High Life ne se gène pas pour commercialiser aux Etats-Unis la gamme « The Champagne of Beers » en cannettes et dans des bouteilles de champagne depuis…1903 !
Car les Etats-Unis ne reconnaissent toujours pas les appellations d’origine contrôlée, européennes pour la plupart. Alors ne chasse t-on pas des hordes d’éléphants avec une tapette à mouches ?
Rassurez-vous, tend à dire Marie-Anne Humbert-Genand du Comité Champagne : L’appellation Champagne est très largement protégée dans une grande majorité des pays.
Sauf aux Etats-Unis… l’absence de reconnaissance de l’appellation Champagne aux Etats-Unis nous prive d’outils juridiques efficaces pour faire cesser tout usage abusif du nom Champagne dans ce pays.
Alors oui, s’ils peuvent être commercialisés aux Etats-Unis, ces produits aux dénominations abusives ne peuvent toutefois pas être exportés dans les pays qui protègent l’appellation Champagne.
Suggestion du chef
Cerise sur le gâteau, j’allais oublié de vous dire : AB InBev est le plus grand groupe brassicole au monde et aussi la plus grosse capitalisation à la bourse de Bruxelles : 103 Milliards € (à titre de comparaison le groupe LVMH, c’est 447 Milliards €) !
Alors pour résoudre une situation qui nous passe largement au dessus de la tête, je suggère une solution simple et surement plus efficace : que Bernard Arnault, Pdg de LVMH et -on peut le supposer- membre actif du Comité Champagne, passe un coup de fil à Michel Doukeris, Pdg d’AB InBev : Allo ! mon Mimi on a un problème…
Tous les deux sauront régler la question autour d’une bière !
François