Taïwan : la nouvelle mode du vin nature

On continue notre petit tour d’Asie : après l’Inde, le Japon, aujourd’hui Taïwan et C’est Merlin Salerno qui s’y colle : Merlin est sommelier consultant en…Georgie. Pas forcément le pays le plus proche de la patrie du Kuomintang ! Mais sa connaissance de l’Extrême-Orient fait de ce fils de vigneron un témoin unique de la montée en puissance des vins nature, bien au delà des arrondissements bobo de la capitale parisienne.

juste une mode ?

Ce n’est plus un secret, en France, le vin nature connait un véritable essor et n’a plus à rougir face aux grands crus traditionnels. Les défenseurs des vins sans sulfite, ou avec une faible dose, s’étaient réjouis d’apprendre qu’en 2020, la bouteille vendue au meilleur prix aux enchères à Drouot était un vin biodynamique du Domaine Leroy, un Musigny 2001, pour la somme de 17499€. La même année, on note aussi la vente d’un d’Arbois Pupillin de chez Pierre Overnoy (figure emblématique des vins naturels), pour 1658 €.

Et pour ceux qui auraient encore des doutes, il suffit de regarder les finales du concours du meilleur sommelier de France depuis 2016 pour s’apercevoir que tous les candidats, lors des épreuves du fameux accord mets et vins, citent au moins un vin nature (Thomas Pico, Fabien Jouves, Marcel Lapierre, etc.).

L’engouement planétaire du Vin Nature

Le vin nature, dont l’histoire a débuté il y a presque maintenant trente ans dans la région du Beaujolais, s’est vite propagé dans toute l’hexagone. Mais pas que… Les grands noms exportent désormais une grande partie de leur production dans le monde entier (Canada, USA, Australie, Japon, Chine, Corée du Sud, etc.). Et l’Asie fait figure de bon élève.

En tête on retrouve le Japon, accro à l’énergie que contiennent ces flacons depuis plus de vingt ans.

Celui qui s’est baladé dans les caves, bars et restaurants de Tokyo à Osaka sait que leurs collections n’ont rien a envier aux meilleurs caves parisiennes. Elles sont mêmes souvent plus impressionnantes et diversifiées. Les professionnels japonais importent des vins natures du monde entier, là où la France reste assez chauvine.

Depuis une dizaine d’années, la Corée du Sud a suivi le mouvement. A Séoul, les établissement proposant ce genre de produit est en plein essor. Dans les quartiers, même ceux réservés à la jeunesse, il en devient parfois difficile de trouver du vin conventionnel.

Car oui, la jeune génération branchée du pays s’enivre désormais de flacons sans sulfite ajouté.

Taïwan et la quête de mieux consommer

Si jusque-là, Taïwan était hermétique à cette mode, depuis quelques années, les Taïwanais sont à la recherche d’une alimentation plus saine suite à une sensibilité accrue aux enjeux environnementaux. Les magasins bio sont de plus en plus nombreux. Et la demande croissante des produits biologiques et le développement de ces circuits de distribution a finalement ouvert la voie au marché des vins naturels et biodynamiques.

Alors qu’il était pratiquement impossible de boire un vin naturel il y a moins de 10 ans, aujourd’hui, les importateurs, cavistes et sommeliers s’allient pour diffuser leurs connaissances sur ce nouveau produit auprès des consommateurs. Ainsi, récemment, une série de conférences, d’ateliers et de dégustations sur le thème des vins naturels ont attiré les amateurs de vins appréciant les valeurs transmises par le vin naturel : le respect du terroir et le goût de l’authentique.

un salon qui cartonne

Cela s’est concrétisé par la création d’un salon des vins nature « Buvons nature » à Taipei en 2016. Et la dernière édition a connu un franc succès auprès des consommateurs, rassemblant plusieurs milliers de personnes. Une vague de vins naturels, bio et biodynamiques déferle sur le marché taïwanais ces dernières années.

Considérée comme « une véritable révolution du vin », la philosophie de ces vignerons innovants est très appréciée des amateurs-connaisseurs du pays. En plus d’une demande croissante pour les produits naturels ou biodynamiques sur le marché, cet engouement entraîne l’ouverture de plus en plus de cavistes, de bars à vins et de bistrots spécialisés dans ce segment sur l’ensemble du territoire à Taiwan, dépassant largement le microcosme de la capitale Taipei.

de Montpellier à Taichung

Ivy Cheng en est le parfait exemple. Originaire de Taichung, la seconde ville du pays, elle est tombée amoureuse du vin lors de ses études en France, à Montpellier. J’ai d’abord été attirée par l’image classe et romantique de ces Françaises assises en terrasse, discutant autour d’un verre de vin et d’une cigarette. Et peu de temps après mon arrivée, à la première gorgée d’un rosé, qui ne devait pas être très bon, j’ai eu un électrochoc, un véritable coup de foudre, nous dit-elle.

À la fin de son année scolaire, rester en France pour travailler dans le milieu du vin lui semble donc une évidence. Un choix de vie qui va la mener à travailler dans différents restaurants et cave à vin, de Lyon à Londres, en passant par Paris.

C’est d’ailleurs là-bas, à la célèbre Cave des Papilles, qu’elle va découvrir le vin nature, avec une bouteille de chez Julien Labet. Son second amour comme elle aime bien le nommer en rigolant.

Dix ans après, Ivy Cheng est en train de finaliser les papiers pour ouvrir son restaurant à Taichung avec une carte des vins 100 % naturel. Le nom de son futur lieu ne laisse d’ailleurs pas de doute : « Mer Nature ». Elle ne réalise pas vraiment : il y a encore peu d’années, elle n’aurait jamais cru que cela serait possible. Encore moins dans sa ville natale, loin de l’effervescence et des expats de la capitale.

Sauf qu’aujourd’hui, l’histoire d’amour entre les Taïwanais et le vin nature ne fait que commencer. Et lorsque l’on a vécu au Japon, en Corée du Sud ou à Taïwan, on sait que lorsqu’une mode immerge, les Asiatiques la vivent de manière frénétique.

Merlin

Ecrit par Merlin Salerno
Catégories : oenotourisme , Taïwan

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