Offrir la vision de tous les acteurs d’un même vignoble dans un même ouvrage, c’est un exercice rare qui n’était possible que sur un territoire restreint – quarante-deux hectares- exploité par un petit nombre de vignerons – dix-huit-
C’est le défi que s’est lancé la revue trimestrielle LE VIN LIGERIEN avec son Hors Série numéro trois.
La revue dresse un portrait de tous les vignerons de l’appellation Quarts de Chaume Grand Cru, l’unique Grand Cru du Val de Loire, identifié en tant que tel par l’INAO.
Plutôt qu’oser la synthèse…
Nous aussi on s’est lancé un défi : lire cette revue en accéléré pour en tirer des verbatim et disposer d’une vision cohérente et sans concession de cette appellation.
Et ce qui frappe tout d’abord c’est la disparité des parcelles classées en appellation Quarts de Chaume Grand cru : le plus grand domaine, le Château Bellerive en possède 12 hectares avec lesquels sont produits 10 000 bouteilles, le plus petit, le Domaine Pithon-Paillé 20 ares pour 300 bouteilles !
Et pourtant le propos est le même chez les dix-huit vignerons,
pour qui le Quarts de Chaume est la quintessence de leur production, un don de la nature qui leur a enseigné rigueur, patience et humilité face aux aléas climatiques et qui leur brule un peu les doigts.
…Un coteau du Layon avec des qualités exacerbées (Pierrot Aguilas)
…Le stade ultime du chenin (J.Fournier)
…Un vin liquoreux, gras, confit, avec des saveurs tellement particulières (P.Achard)
…Les gens comprennent qu’au delà de la sucrosité il y a bien autre chose…La quatrième dimension (A.Guégniard )
…De la dentelle de soie (P.Laffourcade)
…Il faut pousser au maximum la qualité dans le détail. Il faut faire plusieurs tries, trois jours pour presser avec un jus qui ne coule que d’un filet léger…(Tania et Jules Pithon)
…Un liquoreux très haut de gamme qui répond au cahier des charges excessivement exigeant et très restrictif. A tel point qu’en 2012 certains n’ont pas pu produire la moindre bouteille. Mais la qualité est à ce prix. (P.Achard)
Or tout ce qui est rare est cher…
…C’est un produit de luxe, de l’exceptionnel, quelque chose de rare (A.Chateau)
…Il ne faut pas faire du Quarts de Chaume pour gagner d’argent (S.Blanchereau)
…Le Quarts de Chaume c’est notre étendard. C’est un vin de fête. Et quand on le fait gouter, même si la personne ne l’achète pas, puisque cette bouteille a tout de même un prix et bien ça lui apporte la confirmation que les autres vins qu’elle a goutés auparavant sont vraiment bons ! (J.Beaujau)
…La notoriété haut de gamme de ce recoin angevin devra servir les intérêts à terme de l’ensemble des autres crus. (C.Papin)
Mais en filigrane une profonde divergence de vues…
Car au delà du discours unanime transparaît un important décalage sur l’avenir de l’appellation, selon que l’on peut se permettre ou pas l’impasse sur une récolte ou autrement dit selon que l’on possède un petit ou un grand domaine.
Car le questionnement vient d’ ailleurs…Oui, ailleurs où le chenin est devenu un cépage emblématique comme au Chili, en Argentine, en Nouvelle Zélande, en Australie et en Afrique du Sud où il représente 30% du vignoble.
Alors faut-il laisser passer cette opportunité de produire sur ce terroir des chenins secs haut de gamme alors que les ventes de liquoreux stagnent ?
Et que toutes les années ne sont pas forcément propices à la production de ces vins sucrés.
…Je suis d’accord pour dire que le terroir des Quarts de Chaume a un potentiel de liquoreux magnifiques. Mais ne l’aborder que sous cet angle me semble catastrophique pour son avenir…(P.Baudouin)
…Bien sûr qu’on peut produire des vins secs sur ces terroirs de Quarts de Chaume et je ne m’en prive pas. Seulement ils portent l’étiquette d’Anjou blancs (P.Laffourcade).
Guy Rochais le propriétaire du Château de Plaisance lui a trouvé sa solution et vinifie depuis 20 ans une cuvée de blanc sec sur Chaume qu’il a appelé L’insolent…
Alors la profession doit-elle se mobiliser à nouveau pour obtenir l’appellation Chaume Sec ? le débat est ouvert…
François