Nouvelle Zélande #1 : aux antipodes

Lorsque ma belle-fille Gabrielle – Gobynette pour ses fans- nous a annoncé qu’elle était invitée à participer à l’IronMan (méga triathlon) du lac Taupo en Nouvelle-Zélande (NZ), il ne fit aucun doute que sa mère et moi allions l’encourager par notre présence.

Incidemment, ne produit-on pas des vins de qualité en NZ ? Voilà l’occasion rêvée, unique, d’aller voir sur place.

 

Pour y aller -et revenir- vous aurez effectué 38 000 km en 56 heures d’avion et consommé 8,2 tonnes de CO2, selon Myclimate. Soyez rassuré, la récompense est à la hauteur de l’effort.

la capitale la plus sympa du monde ?*

Fin d’été ici à Wellington, la capitale administrative.

Une ville qui rappelle Cape Town ou San Francisco, une ville verte, fraîche, tonique à l’Anglo-Saxonne, avec ses buildings bâtis sur des pentes escarpées, son port démesuré et ses maisons victoriennes à bow-window, souvenirs d’Écosse ou d’Irlande des premiers émigrés.

 

 

Rapidement, l’énergie de la ville vous contamine.

Du monde, il y en a beaucoup dans les rues pentues et ventées : des gaillards colossaux, des filles géantes, les maoris reconnaissables à leur silhouette polynésienne, des asiatiques, des philippins, des touristes chinois et des jeunes européens titulaires du permis vacances-travail en poste dans les restaurants.

Les insulaires du Pacifique-Sud, un melting pot de population et de culture méconnues chez nous sont incarnées dans l’extraordinaire musée national Te Papa, en hommage aux premiers habitants du pays, les Maoris, durement combattus par les colons anglais au 19ème siècle.

Pas de repentance chez les Anglo-Saxons, mais du respect pour construire un avenir multiculturel et une grande fierté d’être kiwi, en dépit d’une actualité tragique.

Tiens, la Nouvelle Zélande est bilingue, vous rappelez-vous du haka, la danse guerrière des All-Blacks pour terrasser leurs adversaires ?

The Economist voit la NZ comme le nouveau Singapour, belle perspective pour un pays de 5 millions d’habitants, 5 millions de touristes annuels et 25 millions de moutons !

 

un vignoble très grand et tout neuf

Le vignoble néo-zélandais représente 1% de la vigne mondiale (source OIV), jolie performance pour un pays de buveurs de bière ! Il est aux antipodes du vignoble européen, c’est géographiquement et historiquement vrai. Un vignoble de 42 000 hectares qui n’existait pratiquement pas il y a 50 ans. Seul Mission Estate à Napier fondé par des missionnaires français peut revendiquer un siècle et demi d’histoire.

Que s’est-il passé ? L’étude de mon-viti.com en explique parfaitement les raisons. On retiendra la qualité des terroirs, un climat propice à la vigne et le sens du business des Anglo-Saxons. Pas d’AOC, pas de règles : on plante les cépages clones de sauvignon blanc, pinot noir, pinot gris, chardonnay, riesling, syrah, tempranillo, albarino, etc, on vinifie en grosse cuverie inox, on transporte souvent en vrac.

NZ v/s Val de Loire ?

Le vignoble NZ est un peu comparable à celui du Val de Loire, même superficie, même mosaïque de terroirs étendue sur 800 km, même production de l’ordre de 3 millions d’hectolitres, un millier d’exploitations.

Avec une énorme différence : la Nouvelle Zélande exporte 80% de sa production, alors que le Val de Loire ne dépasse pas les 20%. Et une grosse concentration capitalistique : les 5 global wine companies : Pernod-Ricard (Brancott Estate), Constellation, Villa Maria, Delegat’s et Graggy Range font 85% du marché.

Lorsqu’une jeune femme en croisière dans les Caraïbes demande un verre de sauvignon blanc, lorsqu’un manager de Shanghai trinque en levant son verre de pinot noir, c’est bon pour le business NZ !

Bon, on aura compris : la grosse cavalerie, les capsules à vis, les vins de cépage sans caractère pour satisfaire le standing social de millions de consommateurs. Erreur ! me dit Michael Hutton, propriétaire de Wineseeker, une cave renommée de Wellington. Sa devise : Life’s too short to drink bad wine! Quelques dizaines de boutique wineries se sont montées à Hawke’s Bay, à Marlborough et surtout à Central Otago ; l’équivalent des artisans vignerons français ou italiens. Des petites exploitations qui pratiquent l’agrobiologie, les vendanges manuelles, les tris parcellaires, les micro-vinifications, les levures indigènes.

Et le bio ?

Sont-elles bio – organic – pour autant ? Pas simple, les mots ne recouvrent pas les mêmes réalités. L’organic ici interdit les traitements à base de cuivre, comme aux USA.

Il existe une première étape : the sustainable winegrowing pratiquée par les 2/3 des exploitations : quelques normes qualitatives, de la traçabilité, mais pas d’interdiction des phytosanitaires.

Question de mentalité, les meilleurs winemakers joue leur réputation sur leur savoir-faire et non sur des certifications rigides pas toujours adaptées.

Rappelez-vous, on est aux antipodes, c’est aussi vrai culturellement !

 

les boutique wineries

C’est incontestablement Kevin Judd, l’ancien chef de cave de Cloudy Bay (LVMH) et photographe renommé qui a lancé le mouvement des boutique wineries. Parti un peu brutalement, il a créé le domaine Greywacke à Marlborough ; son pinot noir et son wild sauvignon sont réputés, me dit Michael qui ajoute : c’est dans la région de Central Otago, au milieu de l’ïle du Sud, que les choses bougent en ce moment, avec les Japonais Yoshi et Kyoko Sato formés en France à la biodynamie.

Leurs pinot noir et pinot gris débarquent maintenant sur les tables étoilées, sans oublier le Domaine de Felton Road (Blain Walter), très bien décrit par IdealWine, qui pratique aussi la biodynamie sur ses 24 hectares, en élevant des faucons pour chasser les pest birds gourmands de baies.

Je me rends régulièrement en France et, soyez rassurés, je crains que nos vignerons NZ n’atteignent jamais la perfection des Grands Bourgognes. Évidemment un terroir travaillé en vigne depuis des siècles aura toujours plus de complexité et d’expression qu’un terroir neuf ; d’ailleurs ici on ne connaît pas les vins de garde et leurs subtiles arômes tertiaires.

Européenne ou australe, une même génération vigneronne partage les valeurs de la civilisation du vin en bien commun. C’est ce qui nous rapproche des antipodes.

New Zealand Wine Story
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Jean Philippe

*d’après Lonely Planet 2011

A suivre NZ #2 :  le Marlborough Wine Tour

Ecrit par Jean-Philippe RAFFARD
--------------------------------------------------------------- Toujours volontaire pour une virée dans le vignoble du bout de la Loire, du bout de la France, du bout de l’Europe ou du bout du monde, là où il y a des vignerons, là où il y a du bon vin. Jean Philippe n’oublie pas sa vie antérieure en marketing-communication pour lever le voile sur le commerce du vin et l’ingéniosité des marchands.

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