Non, le vin ne va pas disparaître

Tu laisserais des vignes en friche, toi ?
– Si je ne peux pas faire autrement, je serai bien obligé.
– Tu es devenu complètement fou ! dit Léonce, incapable d’envisager une telle éventualité.
– Tu n’as jamais connu une crise comme celle-là répliqua Arthémon. C’est la misère partout. Les petits propriétaires comme les grands, les journaliers comme les artisans crèvent de faim.

Christian Signol dans les Vignes de Sainte Colombe (LGF 1996) nous transporte dans le monde viticole de la fin du XIXème siècle jalonné de crises et de malheurs.

L’espérance et la détermination d’Arthémon finiront par l’emporter au prix de mille difficultés.

 

Sauvé par la résilience

Loin de nous l’idée de vouloir le comparer avec la pandémie de Coronavirus. Crise climatique, économique, environnementale et maintenant crise sanitaire pèsent lourd sur les épaules de la communauté vigneronne. Elle fera front avec les mêmes qualités de résilience qui la sauvèrent il y a 150 ans. Le vin ne va pas disparaître.

Je bosse, je bosse

Dans le sud, en terre languedocienne comme ailleurs, tous les commerces qui ne sont pas de première nécessité sont fermés. Chute brutale des commandes des restaurants et des cavistes depuis des semaines, et qui attendent désormais un indice de la fin du confinement. Vols de vins dans les caves. Ce ne sont pas les occasions qui manquent de se morfondre et pourtant il y a de quoi s’occuper !

Fabien bichonne ses ceps. Je bosse je bosse… il me faut supprimer les herbes dans les jeunes vignes pour éviter la concurrence. Mais ça reste bio. Je scalpe les racines avec le tracteur.

J’ai une mise des Petits Princes qui attend. Avec mon fils Romain, on pose la phéromone pour relancer les principes de la confusion sexuelle des papillons.

C’est le temps de la transmission des savoirs au Mas de L’Erme. L’apprentissage par le geste, in situ. Il y a la taille qui se termine, l’apprentissage de la conduite en pratiquant le décavaillonnage.

Renverser la tendance

A l’initiative du Château Capion qui propose de fédérer les forces locales, on cherche à renverser la tendance. Le maître mot c’est la créativité. Avec la création de DDwine pour l’instant on est une dizaine de vignerons des Terrasses du Larzac qui se lancent dans la vente directe. C’est de la distribution directe autour de soi, avec des opérations 5+ 1.

On n’était pas prêts à ne plus vendre et laisser faire les réseaux habituels, la Grande Distribution.

Le reste du temps on est confinés comme les autres. Pour se détendre les garçons jouent au basket dans la cour, mais sur un panneau de basket maison, avec un panier innové dans le cercle métallique d’une barrique !

On ne baisse pas les bras. On avance. Il faut s’adapter, bouger les lignes. Le vin ne va pas disparaître. On peut le rassurer les passionnés du vin non plus c’est une évidence, alors : Avanti !.

La fierté des cavistes

En ces temps de confinement, les autorités ont réaffirmé le rôle des cavistes dans le commerce alimentaire de proximité.

Gaétan Picard anime l’Arbre à Bouteilles à Nantes, une cave renommée pour ses vins bio et nature.

Il assume pleinement cette responsabilité sociale basée sur la solidarité et pourvoyeuse d’évasion. J’ai dû revoir mon organisation, la boutique est ouverte 3 jours/semaine l’après-midi seulement. Je prends des commande par-email ou au téléphone et je fais des livraisons à domicile.

Gaétan sillonne le vignoble nantais avec sa camionnette, va dépanner les domaines pour leurs livraisons, en jouant ce rôle humble et indispensable de facilitateur, si nécessaire à la filière viti-vinicole en ces temps difficiles.

Les visites sont reportées

L’agenda des Portes Ouvertes aux domaines, des salons, des marchés, des randonnées dans les vignes, des fêtes vigneronnes s’étiole jour après jour. Ce printemps, la vigne ne verra pas ces cohortes de joyeux promeneurs folâtrer dans ses rangs ; le tourisme vigneron est sévèrement touché.

Franck Pasquier de Nantes Wine Tour, opérateur incontournable pour les visites de vignoble en Val de Loire réagit. « C’est mort cette année, la saison avait à peine démarré avant le confinement, il peut y avoir quelques reports à l’été ou en automne. Nous avons une grosse activité avec des agences étrangères, aux USA en particulier, alors on gère les annulations, les remboursements d’acompte. »

Calme plat aussi pour les prestations en entreprise, avec en prime une inquiétude. Est-ce que les opérations de team-building seront prioritaires quand l’activité économique redémarrera ? Alors Franck travaille dans son jardin avec le téléphone en coin d’oreille.

Il ne dira pas combien il est actif dans le soutien aux entrepreneurs individuels qui gravitent autour de Nantes Wine Tours, eux aussi très impactés. Il y aura des leçons à tirer, c’est évident, on doit mieux fonctionner en réseau.

Le dernier mot à la poésie

Dans ce panorama sombre-obscur, voici un poème d’espoir publié sur Facebook par Stéphane et Vincent Perraud. Les vignerons-récoltants de Clisson, domaine des Cognettes font tellement écho à la résilience vigneronne :

Encore ce matin,

Le froid est malin

Il n’a pas pris notre pain

Le bourgeon est sain

Nous voilà serein.

Le vin ne va pas disparaître

 

Jean-Philippe et Jean-Luc

Ecrit par Jean-Philippe RAFFARD et Jean-Luc POIGNARD

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