des vignobles pour les toits de la ville

Les projets d’agriculture urbaine font florès et ne sont plus l’apanage des bobos : A Brooklyn NY, il s’appelle Rooftop Reds, The World’s First Commercially Viable Rooftop Vineyard.  A Paris c’est l’appel à projets Parisculteurs dont Virginie Dulucq a été l’une des lauréates et qui a planté des vignes sur les toits de la Mairie de Paris. Plus récemment à Montréal, c’est Vignes en ville : un projet en incubation au Laboratoire sur l’agriculture urbaine (AU/LAB) lancé fin 2016 par Véronique Lemieux.

monter un projet de recherche au Québec

Il n'est pas forcément nécessaire d'être issu de la communauté scientifique pour convaincre un laboratoire de Recherche affilié à université canadienne de lancer un nouveau projet : il suffit de l'intéresser.

Véronique Lemieux, diplômée d'une école de commerce international a découvert très tôt le monde du vin avec son entreprise d'importation de vins naturels au Québec. Puis elle s'est passionnée pour l'agriculture urbaine avec une formation en permaculture design à l'Université d'Etat d'Oregon et les cours de l'école d'été de AU/LAB. Sa révélation de la viticulture urbaine ? Elle l'a eue à Brooklyn à Rooftops Reds. Elle a alors soumis un projet d'étude de vignes en ville à AU/LAB qui accepté de lui en confier la coordination.

Bel esprit d'ouverture du monde de la Recherche !

Pour l’anecdote : Pierre-Antoine Giovannoni, vigneron angevin au Château de la Viaudière que nous citons souvent, m’avait dit il y a quelques semaines: toi qui vas souvent au Canada, tu dois absolument rencontrer Véronique Lemieux, elle s’est lancé dans un projet de dingue pour Montréal : faire pousser de la vigne sur les toits de la Ville…

Merci FaceBook et Instagram : Vignes en ville est très active sur les réseaux sociaux et la communication est soignée ! Une bonne façon de se briefer depuis la France avant d’entrer dans le vif du sujet.

Et me voilà, ce petit matin ensoleillé de septembre, à 300 mètres du fleuve Saint Laurent, sur le toit du Palais des Congrès, zigzaguant parmi les 80 pieds d’une vigne déjà bien mûre, à la rencontre d’une vigneronne pétulante et légèrement suractive !

Pas le temps d’attraper mon stylo, mon cahier, les questions ce sera pour plus tard !

Véronique Lemieux : Ici on teste différents cépages : marquette, petite perle, frontenac noir et frontenac blanc qui a l’air de muter en frontenac gris…des cépages hybrides particulièrement résistants au froid dont les raisins vont être vendangés pour la première fois cette année.

Tu viens tu ?…Ici le contact est facile et les barrières de langage tombent vite. Et c’est tant mieux !

Les pieds de vigne sont cultivés dans des pots géotextiles remplis de terreau de verre. Ils sont palissés sur des pieds de tomates retournés et répartis sur la toiture. L’hiver, ils sont rassemblés le long des poutres porteuses de la toiture car, avec le gel, leur poids augmente.

Mais quelle est la finalité de cette étude ? La vigne est peu gourmande en eau, elle permet de lutter l’été contre les îlots de chaleur et elle séquestre beaucoup plus de carbone que les plants de tomate ! Elle peut avoir un rôle très important et précis à jouer dans un écosystème.

La vigne pour lutter contre le réchauffement climatique ?

Véronique virevolte parmi les rangs : comment se fait-il qu’elle ne soit pas plus présente aussi dans les aménagements éco-comestibles ?

L’idée est bien de valider la culture de la vigne dans ce type de milieu urbain avec les contraintes climatiques du Québec :  Cet hiver nous avons mesuré -47°c sur le toit ! Mais quand la vigne est en dormance, le -40c n’est pas si grave, c’est le gel racinaire qui est un grand danger et si les racines sont protégées par une membrane de toiture, il n’y a pas de souci à se faire !

 

le partenaire qu’il vous faut

La première année, la SAQ (Société des Alcools du Québec) que nous avions déjà présentée ici a donné un sérieux coup de main à Véronique en fournissant des membranes usagées isolantes de thermofoils qui équipent ses conteneurs maritimes. Les pieds de vigne ont pu passer les grands froids à l’abri, leurs racines réchauffées par les toits avec une température maintenue à -7°c.

Puis la SAQ s’est intéressée de plus près au projet. Il faut dire que la société d’Etat met sur le marché québécois quelques 200 millions de bouteilles par an et qu’elle est sommée par le gouvernement de trouver des solutions de recyclage ; c’est peu dire qu’elle a la pression !

La vigne urbaine présentait des opportunités que la SAQ a saisi au vol en devenant dès la deuxième année du projet le principal partenaire financier de Vigne en ville.

Les applications de recyclage sont multiples, à commencer par le sable de verre -en remplacement du sable minéral- dont sont remplis les pots des pieds de vigne du Palais des Congrès.

La deuxième expérience menée par Vignes en ville au siège de la SAQ a fait appel à du paillis de verre : Près du Pont Jacques Cartier, les vignes sont en pleines terre et ce paillis pourrait augmenter  le mûrissement du raisin en raison du phénomène de réverbération de la lumière..

Je sors mon appareil : t’embêtes pas, je peux te fournir des photos de pros ! C’est vrai la communication est soignée !

appel à candidature

Entre le toit du Palais des congrès, celui de l’Institut de tourisme et d’hôtellerie du Québec (ITHQ), le siège social de la SAQ, ce sont près de 300 pieds de vigne qui ont été plantés. Ils forment le projet Vignes en ville, qui conjugue expérimentation scientifique, verdissement et vignoble urbain rappelle le journal québécois Le Devoir.

A terme Véronique Lemieux rêve de réaliser un autre vignoble en pleine terre, comme à Paris, sur un toit de Montréal  en tentant de recycler le plus de matière possible, le bâtiment bénéficierait d’une membrane végétale de 20cm ce qui représente une isolation supplémentaire, la vigne serait contente !

Et ça permettrait, si le toit est accessible, de permettre aux employés de l’entreprise de profiter d’ un espace bucolique, c’est un peu ce qu’on a essayé de faire à la SAQ : un vignoble en permaculture, avec des fleurs, avec des tables à pique-nique…Tu sais la plantation et l’entretien d’un vignoble intrigue et intéresse de plus en plus d’oenophiles québécois !

Alors on prévoit tout bientôt une dégustation à la SAQ ?

François

photos à la Une : © google Maps + AU/LAB

photos articles © Vignes urbaines, Palais des congrès de Montréal.

Ecrit par Francois SAIAS
--------------------------------------------------------------- Scénariste, réalisateur, documentariste pendant de nombreuses années, François a gardé la curiosité de son premier métier et s'est investi depuis dans le monde du vin, ses rouages, son organisation, ses modes de fonctionnement.

2 commentaires

  1. Fondanaux Marie-Claude dit :

    Et la notion de terroir dans tout ça ?

    1. Francois SAIAS dit :

      Merci pour ce message : comme vous le savez sûrement la notion de terroir se définit par l’interaction entre un espace naturel et une société humaine. L’exemple du développement des vignobles urbains en est un bon exemple où l’on retrouve une tradition venue pour beaucoup de la présence de vignobles cléricaux au coeur des cités.

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