De Bruxelles à Bordeaux : l’œnotourisme à vélo

On l’a suffisamment dit sur Génération Vignerons : l’œnotourisme a le vent en poupe depuis plusieurs années. Dans un contexte bien identifié de baisse de la consommation intérieure de vin, l’œnotourisme représente une rentrée supplémentaire importante. Le chiffre de dix millions de visiteurs en 2016 est traditionnellement cité en référence (NDLR : voir notre article sur les Assises de l’œnotourisme). En 2019, année où le tourisme représentait 8% du produit intérieur brut, un visiteur sur trois citait le vin et la gastronomie comme motivation de leur séjour en France.

L’œnotourisme, catalyseur des visites

L’offre de tourisme de proximité s’est étoffée rapidement depuis la pandémie et cette redécouverte du patrimoine, des paysages et des acteurs locaux attire les visiteurs nationaux, régionaux ou locaux. Le tourisme ‘slow’ plait de plus en plus, offrant un intéressant assemblage de découverte et de vécu personnel.

Si le circuit de base de l’œnotourisme, visite-dégustation-boutique, fonctionne toujours bien, d’autres dimensions ont progressivement vu le jour : gastronomie locale, évènements musicaux festifs et vendanges font également le plein aujourd’hui.

On peut cependant se poser la question de savoir si le futur de l’œnotourisme se situe bien là et pas davantage dans une dimension plus expérientielle. 

Si la génération des 20-40 aime certainement faire la fête, il reste prioritaire d’identifier leurs autres attentes, étant donné la chute de la consommation de vin dans cette tranche d’âge. L’envie de vivre de nouvelles expériences plutôt que de se préoccuper de posséder une cave remplie de vins qui y dormiront longtemps est clairement exprimée.

Offrir de l’authentique, du bon et du sain mais aussi de l’émerveillement et du partage va devenir essentiel pour tous les métiers du tourisme et du vin.

le réveil sensoriel

L’immersion sensorielle est certainement une des approches innovantes qui enrichit l’œnotourisme et lui donne une nouvelle dimension. Le réveil sensoriel que ce soit au niveau du toucher comme l’enseigne Cyrille Tota, de l’odorat comme les ateliers de reconnaissance des arômes du vin de manière personnalisée (NDLR : ou de la dégustation géo-sensorielle) offrent aux visiteurs des vignobles et des domaines des expériences très riches et mémorables.

Comme l’écrivait Marcel Proust : L’important dans le voyage, ce ne sont pas les nouveaux paysages, mais un nouveau regard.

La vélorution est en route

Depuis les gilets jaunes et la Covid 19, les Français sont tombés amoureux du vélo ! En ville d’abord avec des initiatives du style « la ville du quart d’heure » à Paris dont l’objectif était que tout se trouve au maximum à un quart d’heure de chez soi à vélo. La sensation d’indépendance que procure le vélo, couplée à une perception d’un bien-être et d’un bénéfice-santé accrus a très rapidement fait émerger le cyclotourisme de loisir. En 20 ans, la France a vu le nombre de cyclistes passer de treize à vingt deux millions !

Le monde du tourisme a bien compris le bénéfice potentiel : d’un modèle de déplacement ringard et peu efficace, le vélo est devenu à la mode et  écologique, favorisé par l’avènement du vélo à assistance électrique (VAE).

Les territoires ont aussi saisi l’intérêt économique de fournir aux millions de pratiquants des infrastructures de qualité et sécurisées. Aujourd’hui toutes les régions de France sont traversées par des véloroutes. La Belgique a opté pour des offres de circuits courts avec une formule de points-nœuds vélo.

Grâce à un simple système de balises directionnelles reliant différentes routes ou pistes cyclables, il est possible au cycliste de programmer sa balade selon ses désirs, la distance totale choisie et les lieux d’intérêt paysagés ou de patrimoine.

Le vigneron durable et l’œnocyclotouriste

Le chiffre d’affaires du vélo représentait 4,6 milliards € en 2020. Quelle part du gâteau le vigneron peut-il espérer ? La combinaison cycle-œnotourisme est-elle de nature à rencontrer les vignerons et à préserver la part d’achat au domaine ?

Pour en avoir le cœur net, nous avons décidé de tester le concept par nous-mêmes.

En collaboration avec une Maison du Tourisme en Belgique, nous avons conçu un week-end cyclo touristique alliant visites de vignobles, patrimoine et expérience sensorielle.

Le Sud du pays regorge en effet de vignobles aussi qualitatifs que diversifiés. Début septembre, six cyclotouristes ont vécu une escapade test…sous le soleil.

Au programme : visite de vignobles avec dégustation et découverte de sites touristiques, le tout agrémenté de gastronomie de terroir et d’un hébergement  de charme entouré d’arbres centenaires.

De ce parcours oenotouristique, nos visiteurs ont adoré :

L’approche « slow » offrant des échanges prolongés avec les vignerons : le vélo offre un maximum de liberté, permettant des arrêts non programmés devant un paysage inattendu et une découverte de la façon dont le vignoble s’intègre parfaitement dans le paysage,

Le partage de la même passion avec d’autres touristes inconnus jusqu’alors,

Une expérience nouvelle de redécouverte des sens illustrée par une sieste vigneronne racontant les saisons de la vigne sous fond d’une composition musicale originale,

Le bon état des routes et pistes cyclables dans l’ensemble, sécurisant la balade.

Du côté du vigneron :

L’intérêt marqué des visiteurs pour une meilleure connaissance de leur métier,

L’accompagnement de la balade par une professionnelle du tourisme, assurant aux domaines de taille moyenne un respect des horaires prévus. La gestion de touristes éparpillés sur la journée est en effet compliquée pour des petites structures, monopolisant trop de ressources humaines,

L’absence d’investissement préalable pour cette activité oenotouristique, les différents frais étant couverts par l’organisation qui les répercutent sur le visiteur dans une formule « tout compris »,

Une dépense moyenne par visiteur de l’ordre de 120 € permettant de couvrir le temps consacré.

L’œnotourisme à vélo sous forme d’une journée découverte ou d’un week-end « slow » semble pouvoir correspondre à un objectif SMART (spécifique, mesurable, atteignable, réaliste et temporel) offrant une expérience nouvelle aux touristes, alliant échanges vignerons, découverte de paysages et de patrimoine historique et réveil sensoriel .

Avec une formule organisationnelle bien conduite et respectueuse, bénéficiant d’un réseau cyclable sécurisant, le vigneron peut y trouver un intérêt qu’il n’avait pas nécessairement pu évaluer jusqu’à présent.

A essayer entre Bruxelles et Bordeaux !

Marc

Ecrit par Marc Tomas
Le vin est instrument de plaisir profond mais aussi de partage. Formé en éco-oenotourisme à l’Institut Scientifique de la Vigne et du Vin (ISVV) de Bordeaux, Marc a souhaité mettre sa passion et son expertise au service des vignerons dans le développement d’une offre oenotouristique innovante et de proximité.
Catégories : Belgique , France , oenotourisme

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