Afrique du Sud#6 : les Carême

Petite nostalgie Africaans, en ce printemps précoce ; alors je me suis rappelé les paroles de mes amis sommeliers Jean Vincent Ridon et Denis Garret : si tu passes par Vouvray, vas donc saluer de notre part Vincent et Tania Carême, tu feras une belle rencontre et une belle dégustation ! Rendez-vous pris à la mi-mars pour rencontrer le vigneron Vincent Carême, fils de vigneron, par ailleurs professeur au lycée viticole d’Amboise et son épouse Tania originaire d’Afrique du Sud, dont le portrait dressé par Jean Claude Bonnaud dans son livre La Loire est en Elles (Édition JCF Rives de Loire) donne immédiatement envie de la connaître. Elle est l’une d’entre Elles, parmi ces quarante-quatre femmes ainsi distinguées, dont le destin est entremêlé de vigne, de vin et de Loire ; à déguster sans modération !

Je n’oublie pas ma belle rencontre récente avec Johandie Poupard elle aussi d’origine sud-africaine, qui a lié son destin à un autre vigneron français, Antoine Poupard du Domaine de la Petite Roche en Anjou.

Le hasard d’une rencontre en Afrique du Sud avec des vignerons français,

Damien et Corinne Delecheneau, un voyage en France dans la foulée et un dîner où Vincent était présent, c’était en 2004. Un an plus tard, on s’est revu et au cours de cette deuxième rencontre, ça a été vraiment le coup de foudre, raconte Tania.

Nous échangeons sur la situation des vignerons en Afrique du Sud- un sujet que Tania et Vincent connaissent parfaitement puisqu’ils s’y rendent chaque année pour visiter la famille et vinifier leur propre vin Terre Brulée – Le Blanc et Le Rouge – à partir de raisins provenant de la région du Swartland.

Comme me le fait remarquer Tania, je n’ai vu et dégusté lors de mon périple que la vitrine – ou le Petrus- d’Afrique du Sud.

 

La réalité est certainement moins glamour :

L’Afrique du Sud est soumise aux forces des marchés internationaux, les investisseurs n’hésitant pas à planter et à faire arracher des cépages en fonction des modes et des tendances. Il y a une nouvelle génération de vignerons qui font leur propre vin, en souhaitant leur donner une identité propre ; vous en avez rencontré en Swartland, là où le fynbos et le renosterveld -la garrigue locale- apportent une typicité singulière aux terroirs me dit Vincent qui naturellement se sent très proche de ces nouveaux vignerons.

Typicité, elle est aussi dans l’habitat troglodyte de la rue des Haut Clos, à Vernou sur Brenne, près de Vouvray ; là où se trouvent sa cave et son caveau ; là où les vins sont élevés avec un soin méticuleux dans les galeries creusées dans le tuffeau.

La modestie du lieu tranche avec la réputation du Domaine Vincent Carême, on sent que le vigneron donne tout à la vigne et à ses vins : 17ha en bio, une production annuelle d’environ 80 000 bouteilles, pour moitié en effervescent. Claire l’assistante, éclaire aussi ma lanterne sur le terme trie, au féminin. La Première Trie n’est produite que dans les années d’exception comme 2015 avec un raisin très concentré à 90g de sucre résiduel, puis le Moelleux et enfin le Tendre avec 20g de sucre résiduel.

La science du vin moelleux est ici à Vouvray sensiblement plus aboutie qu’en Coteaux du Layon. Il y a une gradation intéressante dans la sucrosité, que les mots expriment poétiquement.

En vin tranquille, la typicité du chenin vouvrillon s’exprime pleinement comme à l’exemple du Clos 2015, un chenin tout en tension, droit, sans excès de minéralité, avec une aromatique de fruits blancs qu’équilibre une acidité ponctuée de petits amers, un cru issu d’un parcellaire d’argile à silex.

Habitué à déguster l’Anjou blanc,

 je découvre une expression différente du chenin, certainement influencée par le calcaire. Une fraîcheur, une douceur toute tourangelle m’avait dit Jean-Claude Bonnaud. Une bouteille attire mon attention, le rosé Fizzy Pink (8,70€), bouchée en capsule. En bouche, c’est une explosion de fruit rouge légèrement poivré, poussée par une franche effervessence. L’ancien propriétaire cultivait un peu raisin rouge, du côt, du cabernet et du gamay, pour sa consommation familiale. J’ai gardé les vignes et on fait aujourd’hui ce Pet Nat qui plaît bien. 

Quelques images d’Afrique du Sud me traversent la tête ; les winemakers que j’ai rencontrés ont pour modèle l’artisan-vigneron français, maître de son destin, propriétaire de son domaine, qui signe ses vins- à l’image d’un Vincent Carême. Respect.

Jean Philippe

en tête : ©photo Patrick Maclart www.bourgogne-wineblog.com

Ecrit par Jean-Philippe RAFFARD
--------------------------------------------------------------- Toujours volontaire pour une virée dans le vignoble du bout de la Loire, du bout de la France, du bout de l’Europe ou du bout du monde, là où il y a des vignerons, là où il y a du bon vin. Jean Philippe n’oublie pas sa vie antérieure en marketing-communication pour lever le voile sur le commerce du vin et l’ingéniosité des marchands.

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