Raconter Baraveou et l’histoire de Jean-Philippe Fourney, cela revient à faire passer les 12 travaux d’Hercule pour un examen de mathématiques de primaire !
A la lueur des superbes couleurs automnales, mêlant l’orange, le jaune et un vert délicatement passé, j’ai rencontré Jean Philippe en Octobre 2021 lors de l’enregistrement d’un épisode pour le podcast le Bon Grain de l’Ivresse.
Il a eu l’extrême gentillesse de s’asseoir à sa table de pique-nique, surplombant ses vignes, avec une bouteille de rouge de son domaine en appellation Bandol pour nous décrire son travail. Et il fallait bien ça pour expliquer tout ce qui a été entrepris au domaine depuis sa création.
Débutée il y a plus de 10 ans, l’aventure part d’une envie de s’installer. Malgré le prix des vignes, toujours au-delà du budget qu’il peut mettre sur la table, Jean Philippe saisit une opportunité en se portant finalement acquéreur d’une maison en ruine au milieu d’une forêt sauvage de 7 hectares.
Le nom de la ferme “Baraveou” anciennement en place donnera son nom au domaine. Tout est à faire, il n’y a pas de vigne à portée de vue et ses copains de la région sont persuadés qu’aucune d’elles ne pourra se plaire dans cet environnement hostile.
L’indispensable force de la conviction
Malgré les doutes de ses proches, Jean-Philippe met du cœur à l’ouvrage et démarre les travaux. Les années de durs labeurs se succèdent pour défricher les quelques hectares de forêt. A la seule force du poignet et avec une patience extrême, ses premiers hectares de vignes sont finalement plantés en 2015. Sensible à une certaine définition de l’esthétique, Jean-Philippe les a disposés sur des restanques, merveilles de construction réalisées à la main évidemment.
Ainsi exposées, elles forment un amphithéâtre naturel dont la beauté est proprement époustouflante.
Après l’installation des premières vignes, Jean-Philippe doit attendre 3 ans de plus pour pouvoir produire son premier millésime. Démarré officiellement en 2011, l’aventure connaît un premier aboutissement avec la production de son premier vin à partir des raisins vendangés en 2015. C’est vous dire le travail réalisé et la force de caractère qu’il a fallu à Jean-Philippe pendant ses 4 années pour sortir de terre un domaine auquel lui seul croyait.
La poursuite de la perfection dans tous les gestes
Non content d’entreprendre ce défi colossal, Jean-Philippe exerce en parallèle ses talents au domaine Tempier en tant que chef de culture. Proche de Daniel Ravier, l’emblématique patron de la maison, il en a tiré une certaine idée du vin, du mourvèdre (le cépage roi de la région) et des pratiques culturales à mettre en œuvre chez Baraveou. Comme dans tout ce qu’il entreprend, la recherche du moindre détail à perfectionner est la norme dans sa réflexion.
La question du greffage est en ce sens emblématique de la philosophie du domaine. Au lieu de s’approvisionner chez les pépiniéristes, il parcourt les vignobles de prédilection des cépages recherchés (mourvèdre, syrah) pour trouver leur meilleure expression possible. Cette sélection massale est ensuite directement greffée sur pied à la main. Ce travail titanesque poursuit une idée fixe : produire le meilleur pendant le plus longtemps possible. Jean-Philippe est certain d’une chose : construire un domaine qui puisse rester en l’état pendant des décennies.
Une recherche permanente de qualité
Cette vision extrêmement qualitative se traduit aussi dans les vignes. Après avoir eu de mauvaises expériences avec l’utilisation de produits chimiques dans ses anciennes vies, Jean-Philippe se forme pour travailler plus “proprement”. Il comprend que cela implique de travailler plus en faisant appel à plus de main-d’œuvre, et se lance dans une agriculture sans produits de synthèse. Il s’aperçoit que cette manière de faire peut être régénératrice des sols et porteuse d’une plus grande qualité dans le vin.
En plus de son expérience au domaine Tempier, il continue d’échanger en permanence avec ses collègues de la région ou d’autres régions viticoles. A rebours d’une pensée repliée sur elle-même, il se nourrit des échanges et des expériences vécues par les autres. En perpétuelle évolution intellectuelle, il poursuit toujours le même objectif : faire le meilleur Bandol possible avec les raisins du millésime.
Idée largement partagée dans beaucoup de vignobles, elle prend une résonance particulière au domaine Baraveou. Portée par une humilité déconcertante, il est très facile de prédire que Jean-Philippe continuera à nous régaler de ses exploits. Sincèrement, merci !
En dégustation
Bandol rouge 2020 : la suavité, voilà un mot pour définir ce que j’ai ressenti en goûtant le rouge de Jean Philippe. Parfois difficile à appréhender dans sa jeunesse, le mourvèdre est ici délicatement travaillé en cave pour lui apporter une finesse et une élégance accessible tôt.
Porté par une structure en dentelle, le vin est un subtil équilibre entre sa structure tannique et une fraîcheur déconcertante. Arômatiquement, ça envoie et le vin se plaît à nous régaler pendant quelques secondes. Une vraie source de plaisir, sincère et délicate à la fois.
Florian
Photos issues de la page FaceBook du domaine Baravéou à l’exception de celle de Jean-Philippe Fourney ©Romain Becker