Nous parlons de terroir pour le vin : son sol, son climat et le travail de l’Homme. Ensemble, ces éléments rendent chaque vin unique, une personnalité affirmée : l’oeuvre de chaque vigneron et vigneronne.
tant de points communs
Nous retrouvons ces mêmes éléments pour le café et le chocolat : exposition au soleil, pente, température, humidité, travail de l’Homme, climat… Ils rendent ces produits tout aussi riches et complexes tant sur leur diversité aromatique que gustative.
Ces trois produits ont traversé des siècles d’histoire, que ce soit sur le plan culturel que gastronomique. Produits de commerce à valeur d’or, ils ont toujours fasciné au point d’être considérés comme des biens de luxe par la noblesse de l’époque. La reine Marie-Antoinette avait même son propre chocolatier au 18ème siècle.
la roue de la fortune

Chaque variation de ces éléments aura des conséquences sur la diversité des couleurs, des formes et des goûts qui seront commentés selon des codes de dégustation similaires tels que « fruité », « floral », « terreux » ou encore « épicé » !
On commente la couleur, on apprécie le nez selon une roue des arômes et on savoure les fameuses saveurs (acidulée, sucrée…).
un pays perché

Contrairement aux cafés plus simples de plaine, avec un goût plus franc sans acidité, l’altitude va jouer sur la grosseur du grain, sa densité et son temps de maturation. Avec une acidité également plus marquée, comme sur les vins issus de vignobles d’altitude !
l’arbre du chocolat

Voyant la couleur rouge, vous vous dites que la cosse est prête à être récoltée ? Faux… rouge est un signe que la cosse n’est pas encore mûre.
Le cacaoyer aime la chaleur (au-delà des 25°C) et l’humidité (un taux de 85% est idéal), là où la vigne tolère des températures supérieures à 10°C pour sa croissance (en dormance, la vigne supporte les températures inférieures).
Rien de surprenant d’apprendre que les origines du cacao se trouvent en Amazonie. Pourtant, le plus grand producteur au monde se situe sur le continent africain au Ghana.
Criollo, forastero, trinitario : la trilogie

A la Hacienda Venezia à Manizales, ce sont seulement 0,5 hectares de cacao plantés pour 140 hectares de café. 3 espèces de cacao se révèlent bien plus simples à gérer que la vigne qui connait jusqu’à 10 000 variétés.
Le cacaoyer prend une forme rappelant les vignes plantées en gobelet, pour préserver l’humidité. Il sera taillé deux fois par an. Le cacaoyer pousse au-delà du niveau de la mer jusqu’à 800 m d’altitude.
Donc, la grande altitude n’est pas son terroir de prédilection, excepté ici à la Hacienda Venezia qui valide ses essais de plantation à 2000 m d’altitude grâce à son sol riche en minéraux.
Un peu comme la vigne, une plante rustique qui ne trouvera pas de terrain favorable au-delà des 700 m sauf exception comme les vins argentins de la région de Cafayate à plus de 2000 m.
Il faudra attendre 6 mois pour voir la fleur apparaitre et être pollinisée par une mouche pour obtenir le fruit.
une plante fragile
Autre point commun : le cacaoyer est susceptible aux maladies notamment, les champignons. Ce ne sont pas ses seuls ennemis puisque les fourmis aiment manger ses feuilles, ce qui réduit la photosynthèse pour produire le fruit.

Et comme pour la vigne, il faudra attendre 2,5 à 3 ans avant de voir un cacaoyer produire ses premiers fruits.
Pendant 5 ans, il grandira et prendra du volume avant de se stabiliser à l’âge de 9 ans. L’arbre prend une forme pyramidale en 3 parties : basse, moyenne avec les fruits et haute pour se protéger du soleil. Ses fleurs sont hermaphrodites, comme la vigne, donc le cacaoyer peut s’auto-polliniser.
De la fleur au fruit, 5 mois passeront. Il peut produire des fruits pendant une centaine d’années mais dans la région du Quindio, on l’arrête à 25 ans en coupant le tronc, sur lequel une nouvelle pousse prendra la relève.
tout est bon dans le cacao

Lorsque la cosse change de couleur, passant de rouge à jaune, on la ramasse et récupère les fèves pour les sécher au soleil, en les retournant régulièrement.
Cette chair blanche juteuse au sein de la cosse, appelée mucilage est également délicieuse. Elle est utilisée dans le processus de fermentation des fèves, riche en fibres et vitamines.
En la pressant, on obtient un délicieux jus naturellement sucré, aux notes fruitées et acidulées.
Dans le cacao, rien n’est perdu (comme pour le vin dont on distille en eau-de-vie les lies) : on utilise la peau de la fève pour réaliser des infusions, le contenu de cigarette, dans l’industrie de la cosmétique ou encore pour soigner les cicatrices ou comme fertilisants.

Puis, il sera remué, cette fois en contact avec l’oxygène dans une autre caisse pour 2 autres jours. Enfin, une oxygénation de 2 jours finira le processus à 50°C. A ce moment, il prendra une couleur crémeuse. Les fèves seront mises à sécher 5 jours sur de grandes tables, réduisant ainsi l’humidité de 55% à 8%. Puis, elles seront grillées pour retirer l’humidité restante et renforcer les saveurs. Il faudra ensuite retirer la peau tel un peeling.
comme des pop-corns
Vient ensuite l’étape du toasting à 120°C pour développer les arômes pendant 25 à 30 minutes.

Les fèves seront prêtes lorsque cela crépitera comme des pop-corns ou lorsque cela craque en pressant entre les mains (mais attention de ne pas se brûler !).
Ensuite, nous passons à la phase du broyage des fèves auquel on ajoutera du sucre, amenant à un assemblage au pourcentage de cacao mentionné sur les tablettes que l’on connait.
D’ailleurs, le cacao concassé est très tendance auprès des sportifs car il contient des alcaloïdes qui donnent de l’énergie.
Le gras du cacao varie de 40 à 60%. Le cacao sollicite les hormones du bonheur, il régule le sommeil avec l’endorphine et joue un rôle antioxydant, réduisant le cancer.
C’est un filtre pour le sang. Ce rôle antioxydant est encore un point commun avec le vin ! On dit que le cacao crée une pellicule protectrice à l’intérieur de la peau. Sa consommation recommandée est de 10 à 30 grammes par jour. Le cacao est réputé bon pour le cœur alors que le thé l’est pour l’esprit, le café pour le cerveau.
Arabica, robusta, liberica…

Le terroir de prédilection pour l’arabica fait ici exception à la règle en poussant aussi haut, son habitude se situant en général entre 900 m et 1800 m.
Il existe des centaines d’espèces de cafés, et comme pour le cacao, trois d’entre elles sont les plus connues dans le monde : l’arabica (le moins amer, avec le moins de caféine, pour des arômes plus fins), le robusta (plus de caféine et moins aromatique) et le liberica.
le petit soldat

Chaque fruit du caféier présente deux grains de café « peaberry ». Planté deux centimètres sous terre, le grain de café est attiré par la lumière.
5 semaines plus tard, la jeune pousse porte encore le grain, lui donnant le nom de « petit soldat » ou « fosforo ». Lorsque deux feuilles se développent, le plant s’appelle « chapola ». Cela a donné le nom aux femmes qui travaillent dans la plantation, les chapoleras.
Au bout de 6 mois, le plant devient « colino« . Lumière, humidité et chaleur seront nécessaires pour leur croissance. Il faut être stratégique dans la plantation en montagne et réfléchir en fonction de la pente, de la variété, en veillant à laisser de 1 à 1,5 m entre les plants. L’équipe effectue une plantation triangulaire pour mieux gérer l’érosion et le phénomène de pluie intense qui serpente en virages sur le sol.
un an et une fleur
La première floraison aura lieu un an plus tard.

Les variétés vivent entre 50 et 70 ans. La récolte de chaque baie se réalise à la main lorsque la baie est rouge ou orange ou jaune. L’équipe réalise deux saisons de récolte : une en avril et l’autre en octobre jusque décembre.
L’histoire veut que le café ait été découvert par un fermier et ses chèvres qui mangeaient le fruit en Éthiopie en 700. Ce dernier aurait montré les grains au chef de la communauté. Le chef n’a pas manifesté d’intérêt, jetant les grains dans le grand feu. A ce moment, il a senti la bonne odeur du grain brûlé. Cette fois, le café a attiré l’attention de la communauté. On a commencé ainsi à le consommer comme un fruit, juste cueilli.
de l’Ethiopie à la Colombie
En 1510, apparait une interdiction de consommer du café, considéré comme une drogue. En 1730, le café arrive en Colombie. Puis, les Hollandais et Français ont apporté le café dans le pays. L’exportation commence en 1835. 1927 voit la création de la fédération nationale des producteurs de café, la plus grande du monde.

Le scarabée est dit le pire ennemi parmi les insectes, dévorant les grains de café.
En Colombie, environ 11 millions de sacs de cafés de plus ou moins 60 kg sont produits, soit 4 fois moins que le Brésil qui produit 40 millions de sacs.
Aujourd’hui, les producteurs s’intéressent à une variété hybride, découverte sur l’île de Timor, un hybride issu d’un croisement entre l’arabica et le robusta, présentant davantage de résistance.

Le séchage miel ou honey se réalise avec le mucilage (la chair) et sera donc plus sucré mais aussi plus cher. Le café lavado, sans mucilage, est quant à lui plus doux et moins cher.
Une machine est utilisée pour dépulper le grain. La pulpe sera utilisée ensuite comme fertilisant. Le café lavado sera mis dans l’eau dans une cuve à fermenter 24h. L’ensemble sera mélangé puis on veillera à retirer le mucilage.
chaud mais pas trop

Puis, la moitié sera filtrée et ensuite on versera le restant d’eau chaude. Les Colombiens sacralisent chaque étape de préparation du café dans le moindre détail.
Pour servir une boisson à bonne température, veillez à toujours chauffer le récipient avant ! Également, il convient d’éviter une eau bouillante qui apporte plus d’amertume au café et peut sur extraire les arômes.
Audrey
Image à la Une : crédit Comptoir des Voyages
