La Belgique, ce petit pays au Nord de la France, dont l’histoire commence en 1830, est composé de quatre régions assez différentes : La Flandre est la plus vaste et la plus peuplée, connue pour sa splendide ville de Bruges et ses canaux. Au centre du pays, Bruxelles, capitale de l’Europe. A l’Est, la région germanophone toute proche de l’Allemagne et du Luxembourg et enfin la Wallonie, région de langue française.
La Wallonie est réputée pour être une terre d’accueil par la gentillesse et l’hospitalité des habitants. L’attrait pour les bonnes choses est une autre caractéristique wallonne. Trois AOP occupent une place particulière : le fromage de Herve aux arômes intenses, le beurre d’Ardenne au goût généreux et le Jambon d’Ardenne au goût salé prononcé. D’autres produits sont labellisés IGP : le pâté gaumais de l’extrême sud du pays, la plate de Florenville, une pomme de terre à la texture fine et l’escavèche de Chimay, une préparation froide de poisson à la sauce vinaigrée et épicée.
Il fallait donc bien des vins pour accompagner ces délices. Les Vignerons de Wallonie s’y sont employés avec beaucoup de passion et de talent, au travers des labels AOP et IGP.
Direction les vignobles wallons !
Terre de vin depuis toujours
Célèbre pour ses frites et ses bières, La Belgique est aussi depuis des siècles un pays viticole. Les premiers vignobles dans le pays sont déjà mentionnés au IXème siècle. Contrairement à une idée fortement répandue, ce ne sont pas les Romains qui ont introduit la viticulture en Belgique. Et pour cause : jusqu’au IIIe siècle, la culture de la vigne ne dépassait pas la vallée du Rhône !
Alors à qui doit-on cette présence viticole ? Fort probablement aux moines cisterciens, qui disposent à la fois de territoire, de temps et de science pour bien maîtriser la viticulture. A la fin du moyen-âge, les abbayes cisterciennes de notre région possèdent toutes plusieurs vignobles à l’image de l’Abbaye de Villers-la-Ville, fille de Clairvaux à 50 kilomètres de Bruxelles. Son vignoble intra-muros, en clos, est déjà cité dans un document datant de 1312.
A partir du XVIIème siècle, le vignoble belge va disparaître presque complètement.
Les vins produits en Belgique n’avaient pas la même saveur que ceux exportés de France. Les nantis méprisaient le vin local, alors que la faveur du peuple allait à la bière. La culture maraîchère s’étendait aussi progressivement au détriment de la vigne apportant une réponse à l’explosion démographique.
Ce sera une très longue traversée du désert pour le vin belge. Le mérite de sa renaissance revient à plusieurs pionniers qui vont progressivement tenter de redonner au vin belge la place qui lui revient à partir de 1960.
Les vins wallons aujourd’hui
En 2022 on recensait environ 260 viticulteurs dans le pays, une croissance spectaculaire de 100% en 4 ans, pour une superficie totale de 800 hectares. La Wallonie produit environ la moitié des bouteilles du pays, essentiellement en blancs et effervescents.
La vigne connaît dès lors une véritable passion en Wallonie, le vignoble des Agaises, les domaines du Chenoy et du Ry d’Argent étant les pionniers d’excellence.
Le domaine du Chant d’Eole, dont les cuvées ont été plusieurs fois primées, remporte en 2020 le prix international du « best sparkling wine », meilleur Chardonnay du Monde ! Avec 54 hectares, c’est le plus grand domaine de Belgique. Si les nouveaux domaines sont de plus petite taille, la caractéristique de ces nouvelles parcelles, naît de la diversité des sols et des cépages plantés.
Si le Chant d’Eole se développe sur un sol calcaire, extrémité nord du bassin parisien, les sols limono-argileux dominent en Wallonie. Des plaques schisteuses sont présentes dans la région mosane.
Le tout en bio et biodynamie n’est pas de règle en Wallonie : on retrouve aussi pas mal de pratiques raisonnées, vu le climat septentrional.
Cépages traditionnels ou interspécifiques ?
Il y a autant de vins et de vignes que de grains de sable dans le désert écrit Virgile
En Wallonie, on retrouve plus de 30 cépages différents. Les cépages traditionnels occupent le haut du classement: pinot noir et chardonnay sont les plus utilisés. Pas étonnant quand on sait que la large majorité des vins belges est constituée d’effervescents. On trouve encore dans les 10 cépages les plus plantés le pinot gris et l’auxerrois. Mais les hybrides sont de plus en plus présents: régent en rouge, solaris et johanniter en blanc, tous originaires du voisin allemand. Le solaris ne faisait pas partie du top 10 avant 2010; bien maîtrisé par les vignerons belges, il fournit des vins blancs
Bien maîtrisés par les vignerons belges, ils fournit des vins blancs tranquilles de haute qualité comme le Solaris du domaine du Chapitre ou l’Ô de craie de la coopérative Vin de Liège. Des accords mets-vins distingués s’ensuivent, saumon, coquilles Saint-Jacques ou fromages à pâte dure ou de chèvre.
Le climat a longtemps incité à s’éloigner des cépages traditionnels. Mais le réchauffement de la planète amène des experts climatologues comme Sébastien Doutreloup de l’Université de Liège à prédire que d’ici 30 ans on plantera de la syrah ou du grenache en Wallonie !
Le match entre cépages traditionnels et hybrides est donc nul pour l’instant. Les années à venir seront passionnantes à suivre.
Les appellations en Wallonie
En Wallonie, les vins sont classés sous quatre appellations :
- AOP Côtes de Sambre et Meuse
- AOP Crémant de Wallonie
- AOP Vin Mousseux de qualité de Wallonie
- IGP Vins de Pays des Jardins de Wallonie (dans le futur, Vin de Wallonie)
Bien loin de la situation française, ces appellations sont peu revendiquées et peu connues du grand public. Les cahiers des charges sont aussi moins stricts qu’en France et personne ne s’en plaint actuellement. Avec la croissance rapide des surfaces cultivées, les choses pourraient changer assez rapidement sauf si les parcelles restent de petite taille sans ambition commerciale.
L’avenir touristique
Les vignerons belges sont encore forts concentrés sur la production d’un produit de qualité et stable au fil des millésimes. Cependant, les plus anciens qui sont aussi les plus grands domaines ont bien enregistré l’intérêt de mettre en place une hospitalité oenotouristique.
L’œnotourisme évènementiel a commencé à émerger : afterwork, animation musicale, activités vin’dredis sont devenus des éléments promotionnels dans plusieurs domaines comme le Ry d’Argent, le domaine W ou les Agaises. Chez d’autres, la dimension gastronomique émerge comme le Chant d’Eole avec la présence d’un restaurant étoilé.
Des activités multisensorielles commencent aussi à voir le jour ainsi que des balades à vélo dans et autour des vignes, dans une dimension du slow tourisme.
La très active agence officielle du tourisme wallon, s’emploie progressivement à promouvoir le tourisme du vin et des vignobles.
La qualité des vins wallons est de plus en plus reconnue, essentiellement pour les vins effervescents et les blancs tranquilles, avec de nombreuses médailles internationales. Il reste à développer une identité régionale, qui n’est pas encore très présente du fait d’un relatif éparpillement territorial et de la duplicité des cépages entre la tradition et l’innovation interspécifique. C’est à ce prix que le vignoble wallon sortira d’un effet de mode actuel et deviendra peut-être une nouvelle région de référence en Europe !
Marc
Image à la Une : domaine de Glabais
Que voilà un beau tour d’horizon du (des) vignoble(s) de Wallonie.
Excellent travail de recherche et de synthèse.
Félicitations !!!
Très bel article sur les vins Belges. Un vrai vignoble d’avenir. Merci à vous pour cette mise en lumiére.